March 8, 2006

Le rapport annuel du département d'État sur les droits de l'homme dans le monde

Les États où le pouvoir est entre les mains de gouvernants qui ne rendent pas compte de leurs actes figurent parmi ceux qui ont le bilan le plus mauvais en matière de droits de l'homme, souligne le nouveau rapport sur les droits de l'homme dans le monde que le département d'État a rendu public le 8 mars 2006.

De tels États, qui comprennent la République populaire de Corée (Corée du Nord), la Birmanie, l'Iran, le Zimbabwe, Cuba, la Chine et la Biélorussie, limitent gravement l'exercice des droits fondamentaux inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, notamment la liberté d'expression, la liberté de la presse, la liberté d'association, la liberté de réunion, la liberté religieuse et la liberté de circulation, indique le département d'État dans l'introduction de ce rapport.

Composé de rapports particuliers ayant trait à 196 pays, ce rapport est destiné à évaluer le respect des droits de l'homme dans le monde entier. Il montre que les États-Unis sont résolus « à œuvrer de concert avec les autres démocraties ainsi qu'avec les hommes et les femmes de bonne volonté à travers le monde afin d'atteindre l'objectif durable et d'importance historique qui consiste à mettre fin à la tyrannie sur notre planète ».

L'introduction résume les améliorations constatées dans ce domaine dans les Balkans, en Colombie et dans la région des Grands Lacs en Afrique centrale, qui comprend la République démocratique du Congo, le Rwanda, le Burundi et l'Ouganda.

Bien que des violations des droits de l'homme et des erreurs judiciaires aient lieu dans les États démocratiques, « les pays dotés d'un régime démocratique offrent de bien meilleures protections contre les violations des droits de l'homme que les États non démocratiques », fait remarquer le département d'État dans son rapport. En outre, les droits de l'homme et la démocratie sont étroitement liés, et les deux sont essentiels à la stabilité et à la sécurité à caractère durable.

En 2005, l'Irak, l'Afghanistan, l'Ukraine, l'Indonésie, le Liban et le Liberia ont fait de grands progrès en matière de démocratie, de droits démocratiques et de liberté.

Toutefois, un nombre inquiétant de pays, dont le Cambodge, la Chine, le Zimbabwe, le Venezuela et la Biélorussie, ont adopté ou appliqué sélectivement des lois défavorables aux médias et aux ONG. La Syrie a refusé de se conformer aux appels de la communauté internationale relatifs au respect des libertés fondamentales de sa population et n'a pas coopéré pleinement avec la Commission d'enquête indépendante de l'ONU sur l'assassinat à Beyrouth de l'ancien premier ministre libanais Rafic Hariri.

La Russie a adopté une nouvelle loi restreignant le champ d'action des organisations non gouvernementales, et à la fin de 2005 toutes les stations de télévision indépendantes du pays ont été reprises par l'État ou par des organismes proches de l'État.

« Une société civile robuste et des médias indépendants contribuent à créer les conditions dans lesquelles les droits de l'homme sont bien respectés, grâce à l'information de la population sur ses droits, à la révélation des violations, aux pressions exercées en faveur de réformes et au fait d'exiger des comptes des pouvoirs publics », fait remarquer le département d'État.

Les pays où la situation en matière de droits de l'homme s'est aggravée et où l'anarchie et la corruption règnent comprennent le Soudan, le Népal, la Côte-d'Ivoire, la Tchétchénie et d'autres régions du nord du Caucase russe.

Le but de ce rapport n'est pas seulement de faire connaître les progrès et les violations dans le domaine des droits de l'homme, mais de donner un aperçu des tâches à venir et des possibilités d'une plus grande coopération en vue de répondre aux aspirations découlant de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

On trouvera ci-après le texte de l'introduction du rapport de 2005.
Le Rapport sur les droits de l'homme dans le monde en 2005

Introduction

Le présent rapport décrit comment, partout dans le monde, les pays mettent en pratique leurs engagements internationaux en matière de droits de l'homme. Ces droits fondamentaux, inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, ont été reconnus par les individus de toutes les cultures, de toutes les couleurs, de tous les milieux et de toutes les croyances et constituent ce que le président Bush a qualifié de « revendications non négociables ».

Le département d'État a publié son premier rapport par pays sur la pratique des droits de l'homme en 1977, en application du mandat que lui avait confié le Congrès, et ces rapports sont devenus un élément essentiel des efforts faits par les États-Unis pour promouvoir les droits de l'homme partout dans le monde. Depuis maintenant près de trois décennies, ces rapports servent de document de référence et de fondement aux mesures prises par les gouvernements, les organisations et les individus qui cherchent à mettre fin aux abus et à renforcer la capacité des pays de protéger les droits fondamentaux de tous.

Cette promotion à l'échelle mondiale des droits de l'homme ne constitue pas une tentative de la part des États-Unis d'imposer des valeurs externes aux citoyens d'autres pays ou de s'ingérer dans leurs affaires. La Déclaration universelle demande à « tous les individus et tous les organes de la société (...) de développer le respect de ces droits et libertés et d'en assurer, par des mesures progressives d'ordre national et international, la reconnaissance et l'application universelles et effectives ».

Le président Bush a engagé les États-Unis à travailler avec les autres démocraties et les hommes et femmes de bonne volonté partout dans le monde pour atteindre un objectif à long terme sans précédent, « la fin de la tyrannie dans le monde ».

Certes, des violations de droits de l'homme et des erreurs de justice peuvent se produire et se produisent dans les pays démocratiques. Aucun gouvernement n'est infaillible. Les conditions de droits de l'homme varient dans les démocraties et ces rapports le montrent. De fait, les démocraties encore mal enracinées et souffrant de pénuries de ressources sont quelque fois loin de remplir leurs engagements solennels envers leurs ressortissants, notamment en matière de droits de l'homme. Les transitions démocratiques peuvent être mouvementées et déchirantes. La corruption endémique peut retarder le développement de la démocratie, fausser le système juridique et détruire la confiance publique. Néanmoins, dans leur ensemble, les pays dotés de systèmes démocratiques protègent mieux leurs ressortissants des violations des droits de l'homme que les États non démocratiques.

Pour les États-Unis, la route vers la liberté et la justice pour tous a été longue et tortueuse et le but n'est pas encore atteint. Pourtant, au fil des ans, l'indépendance des branches de notre gouvernement, la liberté de nos médias, notre ouverture au monde et surtout le courage civique des patriotes américains nous ont aidés à garder la foi en nos idéaux fondateurs et en nos obligations envers les droits fondamentaux de la personne humaine.

Ces rapports par pays présentent les faits permettant de mesurer les progrès accomplis et les défis restant à relever au plan des droits de l'homme. S'ils donnent les résultats de chaque pays en 2005 sans les comparer entre eux, ils n'en permettant pas moins d'arriver à des observations convergentes. On en souligne six grands types, appuyés sur des exemples précis de pays ; ils sont censés être illustratifs et ne prétendent aucunement être exhaustifs.

En premier lieu, les pays dans lesquels la totalité du pouvoir est aux mains de dirigeants irresponsables sont parmi ceux où les violations des droits de l'homme sont le plus systématiques. Ils vont des systèmes totalitaires fermés qui privent systématiquement leurs ressortissants de leurs droits fondamentaux aux systèmes autoritaires dans lesquels l'exercice des droits fondamentaux est considérablement restreint.

En 2005, la République populaire démocratique de Corée (RPDC ou Corée du Nord) était toujours un des pays les plus isolés de la planète. Le régime systématiquement répressif contrôlait presque tous les aspects de la vie des citoyens, leur refusant les droits de parole, de religion, de presse, de réunion, d'association et de déplacement, ainsi que ceux des travailleurs. En décembre 2005, le régime s'est encore plus enfoncé dans son isolement en demandant d'importantes réductions de la présence des organisations non gouvernementales (ONG) internationales actives dans le pays.

En Birmanie, où une junte gouverne par diktats, les promesses de réformes démocratiques et de respect des droits de l'homme continuent à servir de façade à la brutalité et à la répression. Le travail forcé, la traite des personnes, l'utilisation des enfants soldats et la discrimination religieuse restent des points inquiétants. Au nombre des abus commis par les forces armées il faut citer le viol, la torture, les exécutions et la relocalisation forcée des ressortissants des minorités ethniques. Le régime conserve son contrôle en surveillant, en harcelant et en emprisonnant les activistes politiques, y compris la lauréate du prix Nobel et dirigeante de l'opposition Aung San Suu Kyi, qui est toujours en résidence surveillée sans avoir été inculpée.

En 2005, les antécédents déjà mauvais du gouvernement iranien en matière de droits de l'homme se sont encore dégradés. Lors des élections présidentielles de juin, un peu plus d'un millier de candidats enregistrés, dont toutes les candidates, a été éliminé des listes par le conseil des gardiens de la République. Le nouveau président de tendance dure a nié l'existence de l'Holocauste et demandé qu'Israël soit effacé de la carte. Les clercs au pouvoir et le président ont continué de gérer la détérioration des prisons où sont enfermés des centaines de détenus politiques, les restrictions de la presse et la réduction continue des libertés sociales et religieuses. Les abus graves, tels que les exécutions sommaires, les violations manifestes de la liberté de religion, la discrimination sur la base de l'ethnie et de la religion, les enlèvements, l'extrémisme le plus dur, et le recours à la torture et autres traitements dégradants se sont poursuivis.

Au Zimbabwe, le gouvernement a continué ses assauts contre les libertés fondamentales et la dignité humaine, renforçant sa mainmise sur la société civile et les ONG des droits de l'homme et manipulant les élections parlementaires de mars. Les membres de l'opposition sont victimes d'abus, dont la torture et le viol. De nouveaux amendements constitutionnels permettent au gouvernement de restreindre la sortie du pays, de transférer à ses services les titres de propriété des terrains réaffectés lors du programme d'acquisition des terres et d'éliminer le droit de contester les acquisitions de terres devant les tribunaux. L'opération gouvernementale Restore Order, initialement conçue pour démolir les logements et commerces illégaux, a déplacé ou détruit les moyens de vie de plus de 700.000 personnes et contribué à affaiblir l'économie déjà faible et déprimée du pays.

À Cuba, le régime a continué à contrôler tous les aspects de la vie par le biais du parti communiste et des organisations de masse contrôlées par l'État. Le régime a supprimé les appels aux réformes démocratiques, tel le Projet Varela qui proposait la tenue d'un référendum national. Les autorités ont mis en examen, arrêté, condamné à des amendes et menacé les activistes de Varela et le gouvernement comptait plus de 333 prisonniers et détenus politiques.

En Chine, la situation des droits de l'homme est restée mauvaise et le gouvernement a continué ses abus graves. Ceux qui manifestaient en public contre la politique ou les vues officielles ou qui protestaient contre l'autorité du gouvernement se sont trouvés harcelés, mis en examen ou arrêtés par les forces de sécurité. Les troubles de l'ordre public et les manifestations en faveur de la réparation des griefs se sont multipliés et plusieurs incidents ont été violemment réprimés. Les mesures clés visant à accroître l'autorité du judiciaire et à réduire les pouvoirs arbitraires de la police et des forces de sécurité ont été bloquées. Les restrictions sur les médias et l'Internet se sont poursuivies. La répression des groupes minoritaires, notamment celle des Uigurs et des Tibétains, n'a pas connu de répit. De nouvelles règles concernant les affaires religieuses ont été adoptées, qui ont accordé une plus grande protection juridique à certaines activités des groupes religieux enregistrés mais la répression des groupes non enregistres et du mouvement du Falun Gong a continué.

Au Bélarus, le président Lukashenko a continué de s'arroger tous les pouvoirs. Des activistes pro-démocratie, notamment des politiciens de l'opposition, des dirigeants des syndicats indépendants, des étudiants et des rédacteurs de journaux ont été mis en examen, condamnés à des amendes, et emprisonnés pour avoir critiqué M. Lukashenko et son régime. Le gouvernement a continué à utiliser les contrôles fiscaux et les nouvelles prescriptions d'enregistrement pour compliquer la vie des ONG, médias indépendants, partis politiques et organisations minoritaires ou religieuses ou pour les empêcher de fonctionner dans la légalité.

En second lieu, les droits de l'homme et la démocratie sont étroitement liés et ils sont tous deux essentiels à la sécurité et à la stabilité à long terme. Les pays libres et démocratiques qui respectent les droits de leurs ressortissants contribuent à poser les fondations d'une paix durable. Par opposition, les pays qui violent en permanence les droits de la personne humaine de leurs propres ressortissants constituent des menaces pour leurs voisins et la communauté internationale.

La Birmanie en est un bon exemple. Seul son retour sur la voie de la démocratie dont elle a été détournée permettra aux Birmans de réacquérir leurs droits fondamentaux. La junte refuse de reconnaître les résultats des élections libres et justes de 1990. La cruauté et la destructivité du régime ont infligé des souffrances sans nom aux Birmans et causé ou exacerbé nombre de maux à leurs voisins, allant de l'afflux des réfugiés à la diffusion de maladies infectieuses, au trafic des drogues et à la traite des personnes. Le 16 décembre, le Conseil de sécurité des Nations unies a ouvert une discussion qui fait date sur la Birmanie.

La République populaire démocratique de Corée est un autre exemple. Lorsque la péninsule a été divisée, la RPDC et la République de Corée (Corée du Sud) en étaient pratiquement au même point de leur développement économique et toutes les deux étaient sous un régime autoritaire. La liberté politique et économique explique la différence entre les deux pays aujourd'hui. Les Nord-Coréens sont privés de leurs droits les plus fondamentaux et la direction autoritaire du régime a produit des dizaines de milliers de réfugiés. Pour obtenir des monnaies fortes, le gouvernement a dû se livrer à des activités illicites - trafic de narcotiques, contrefaçon de devises et de produits tels que les cigarettes, et contrebande. Pyongyang n'a pas porté attention aux appels de la communauté internationale lui demandant de mettre fin à son programme nucléaire.

Le gouvernement iranien a continué à ignorer le souhait de son peuple de mettre en place un gouvernement responsable, poursuivant au lieu de cela une politique dangereuse d'acquisition de la capacité nucléaire et de soutien aux organisations terroristes et demandant - notamment dans plusieurs discours publics du présidant - la destruction d'un État membre des Nations unies. Le déni par l'Iran des droits fondamentaux de ses ressortissants, ses ingérences en Irak, son soutien au Hezbollah, au Hamas et à d'autres organisations terroristes et son refus d'ouvrir un dialogue constructif dans ces domaines ont contribué à renforcer l'isolement du pays.

De même, le gouvernement syrien a refusé d'écouter les appels de la communauté internationale lui demandant de respecter les droits fondamentaux de ses citoyens et de cesser de s'ingérer dans les affaires intérieures de ses voisins. La Syrie a continué à soutenir le Hezbollah, le Hamas et d'autres groupes irréductibles palestiniens et n'a pas pleinement collaboré avec la Commission d'enquête des Nations unies sur l'assassinat à Beyrouth de l'ex-premier ministre libanais Rafic Hariri. Le rapport de l'enquêteur en chef concluait que les éléments de preuve indiquaient une implication des autorités syriennes et montraient à l'évidence que les fonctionnaires syriens, tout en faisant semblant de coopérer, avaient sciemment induit les enquêteurs en erreur.

Par opposition, dans les Balkans, la situation sensiblement améliorée dans le domaine des droits de l'homme, de la démocratie et l'État de droit ces dernières années a contribué au renforcement de la stabilité et de la sécurité dans la région. Des gouvernements de plus en plus démocratiques s'y installent, les criminels de guerre y sont de plus en plus traduits en justice, d'importants contingents de personnes déplacées reviennent dans leurs foyers, les élections y respectent de plus en plus les normes internationales et les pays approfondissent leurs rapports de voisinage afin de résoudre les problèmes postconflit et régionaux. La plupart des pays de l'ex-république de Yougoslavie traduisent les personnes accusées de crime de guerre devant des tribunaux nationaux, chose importante au plan de la réconciliation nationale et de la stabilité régionale. À la fin de 2005, cependant, deux des suspects de crimes de guerre les plus recherchés, Radovan Karadzic et Ratka Mladic, étaient toujours en fuite.

Troisièmement, certaines des violations les plus graves des droits de l'homme sont commises par des États dans le cadre de conflits armés qui ont lieu sur leur territoire ou de part et d'autre de leurs frontières. La décision du gouvernement soudanais de réprimer le soulèvement de rebelles au Darfour en armant des milices « djandjaouids » et en les laissant ravager la région a eu pour résultat un conflit virulent. En septembre 2004, le département d'État a déterminé qu'un génocide avait bien lieu au Darfour. Ce génocide s'est poursuivi en 2005. À la fin de 2005, au moins 70.000 civils avaient péri, près de 2 millions avaient été déplacés par les attaques et plus de 200.000 s'étaient réfugiés au Tchad. La torture a été répandue et systématique au Darfour, tout comme la violence à l'égard des femmes, le viol servant d'instrument de guerre. Selon des informations, on aurait obligé des femmes à partir dans le désert, et leur sort est resté inconnu. L'Accord de paix global conclu par le gouvernement soudanais et le Mouvement populaire de libération du Soudan a ouvert la voie à l'adoption d'une Constitution en juillet et à la formation d'un gouvernement d'unité nationale qui doit rester en fonction jusqu'aux élections de 2009. L'Union africaine a envoyé au Darfour 7.000 soldats, où leur présence a contribué à réduire quelque peu la violence. À la fin de 2005, les attaques des « djandjaouids » contre la population civile se sont poursuivies avec le soutien du gouvernement.

Le bilan du Népal en matière de droits de l'homme qui était mauvais l'est devenu encore plus. Les pouvoirs publics ont continué de commettre de graves violations, pendant et après l'état d'urgence déclaré pour la période de février à avril, qui a suspendu tous les droits fondamentaux à l'exception de l'habeas corpus. Dans de nombreux cas, les pouvoirs publics n'ont tenu aucun compte des ordonnances d'habeas corpus de la Cour suprême et ont arrêté de nouveau des étudiants et des dirigeants de partis politiques. Les insurgés maoïstes ont aussi poursuivi leur campagne de torture, d'exécution, de pose de bombes, de recrutement d'enfants, d'enlèvement, d'extorsion et de fermeture forcée d'écoles et d'entreprises.

La crise politique en Côte-d'Ivoire, qui a continué de diviser le pays, a entraîné de nouvelles violations en 2005, notamment viol, torture et exécutions sommaires commis aussi bien par les forces gouvernementales que par les forces des rebelles. On a signalé un nombre moindre de recrutement d'enfants soldats par les rebelles, et un grand nombre de ces enfants ont été libérés. La violence et les menaces de violence à l'encontre de l'opposition politique se sont poursuivies. Malgré les efforts incessants de la communauté internationale et de l'Union africaine, le processus politique visant à mettre en place un gouvernement fondé sur le partage du pouvoir est resté paralysé. À la fin de septembre, les préparatifs des élections prévues pour le 30 octobre avaient peu avancé, et le désarmement du groupe rebelle « Nouvelles Forces » n'avait pas commencé. Le 6 octobre, l'Union africaine a décidé de prolonger d'un an le mandat du président Laurent Gbagbo.

En Tchétchénie et ailleurs dans la région septentrionale du Caucase russe, les forces fédérales et les forces tchétchènes favorables à Moscou ont commis des violations, notamment torture, exécutions sommaires, disparitions et détentions arbitraires. Parfois, les formations paramilitaires tchétchènes favorables à la Russie ont semblé agir indépendamment de la structure de commandement russe, et rien n'a indiqué que les autorités fédérales aient fait un effort quelconque pour leur serrer la bride ou pour les tenir responsables des violations extrêmes. Les forces antigouvernementales ont aussi continué de commettre des attentats terroristes à la bombe et de graves violations des droits de l'homme dans le nord du Caucase. L'année 2005 a vu la persistance de la violence et des violations des droits de l'homme dans toute la région, où régnait un climat d'anarchie et de corruption.

La région des Grands Lacs en Afrique centrale, qui comprend la République démocratique du Congo (RDC), le Rwanda, le Burundi et l'Ouganda, a été la proie, depuis plus de dix ans, de la guerre civile, d'affrontements entre ethnies de grande ampleur et de graves violations des droits de l'homme liés à des conflits. Toutefois, on a observé moins de violence en général en 2005, et la situation en matière de droits de l'homme s'est améliorée nettement, ce qui a encouragé des dizaines de milliers de personnes déplacées, en particulier des Burundais, à rentrer dans leurs foyers. Le Burundi a conclu son processus de transition d'une durée de quatre ans, et la RDC a fait des progrès d'ordre historique sur le plan électoral. Les États de la région des Grands Lacs ont réalisé des progrès importants en ce qui concerne la démobilisation de milliers d'enfants soldats faisant partie de leurs forces armées et des forces des divers groupes de rebelles. Cependant, plusieurs groupes armés basés dans l'est du Congo ont continué de déstabiliser la région et de se faire concurrence pour s'emparer de ressources stratégiques et naturelles, malgré les opérations de l'armée congolaise avec le soutien de l'ONU visant à dissoudre les groupes armés en RDC. Des milliers de rebelles du Rwanda, de l'Ouganda et du Burundi, notamment les rebelles rwandais qui ont joué un rôle de premier plan dans le génocide de 1994, ont continué de s'opposer au gouvernement de leurs pays respectifs, d'attaquer la population civile en RDC et de commettre une multitude de violations graves, en particulier à l'encontre de femmes et d'enfants. Les gouvernements rwandais et ougandais auraient continué de fournir illégalement des armes à des groupes armés agissant dans l'est de la RDC et y commettant des violations.

En Colombie, les violations des droits de l'homme liées à la persistance depuis quarante et un an d'un conflit armé sur son territoire se poursuivent. Toutefois, l'offensive militaire du gouvernement contre les groupes armés clandestins et la poursuite de la démobilisation des groupes paramilitaires a contribué à réduire les exécutions sommaires et les enlèvements. La Colombie a aussi commencé d'appliquer un nouveau code de procédure pénale fondé sur l'accusation ; cette application devrait être complète au bout de quatre ans. Toutefois, l'impunité est demeurée un grand obstacle, en particulier pour les agents publics accusés d'avoir commis des violations des droits de l'homme ainsi que pour certains membres de l'armée qui ont collaboré avec des groupes paramilitaires.

Quatrièmement, là où la société civile et les médias indépendants sont sur la sellette, les libertés fondamentales d'expression, d'association et de réunion sont compromises. Une société civile robuste et des médias indépendants contribuent à créer les conditions dans lesquelles les droits de l'homme sont bien respectés, grâce à l'information de la population sur ses droits, à la révélation des violations, aux pressions exercées en faveur de réformes et au fait d'exiger des comptes des pouvoirs publics.

Les pouvoirs publics devraient défendre, et non pas entraver, l'exercice dans l'ordre des libertés fondamentales par les membres des médias et de la société civile même s'ils ne sont pas d'accord avec leurs opinions ou leurs actes. Les limites imposées par la loi sur l'exercice de telles libertés ne peuvent se justifier que dans la mesure où elles sont conformes aux obligations d'un pays donné en matière de droits de l'homme et qu'elles ne constituent pas seulement un prétexte pour restreindre ces droits.

Lorsqu'un État se sert de la loi comme arme politique ou comme instrument de répression contre la société civile et les médias, il gouverne au moyen de la loi au lieu de faire respecter l'État de droit. L'État de droit sert de contrôle sur le pouvoir de l'État ; c'est un système destiné à protéger les droits de la personne contre le pouvoir de l'État. En revanche, gouverner au moyen de la loi peut constituer un abus de pouvoir car il s'agit de la manipulation du droit et de l'appareil judiciaire pour maintenir le pouvoir des gouvernants sur les gouvernés.

En 2005, un nombre inquiétant de pays à travers le monde ont adopté ou appliqué sélectivement des lois contre les médias et les organisations non gouvernementales (ONG). En voici quelques exemples.

Le gouvernement cambodgien s'est servi, au cours de l'année 2005, des lois pénales en vigueur relatives à la diffamation afin d'intimider des personnes le critiquant et des membres de l'opposition, de les arrêter et de les poursuivre en justice.

La Chine a imposé de nouvelles restrictions sur les médias et sur l'internet et arrêté au moins deux personnes.

Le gouvernement zimbabwéen a arrêté des personnes qui avaient critiqué le président Mugabe, harcelé et détenu arbitrairement des journalistes, fermé un quotidien indépendant, dispersé avec force des manifestants, arrêté et détenu des chefs de l'opposition et leurs partisans.

Au Venezuela, de nouvelles lois régissant la diffamation et le contenu de la presse parlée, alliées au harcèlement juridique et à l'intimidation physique, ont eu pour effet de limiter la liberté de la presse et de créer un climat d'autocensure. Selon des informations qui ne cessent pas d'arriver, des représentants du gouvernement et leurs partisans ont intimidé et menacé des membres des partis politiques de l'opposition, plusieurs ONG de défense des droits de l'homme et d'autres groupes de la société civile. Certaines ONG ont aussi déclaré que le gouvernement se servait de l'appareil judiciaire pour imposer des limites à l'action de l'opposition politique.

En Biélorussie, le gouvernement Lukashenko a intensifié sa répression à l'égard des groupes d'opposition et imposé de nouvelles restrictions à la société civile. Il a arrêté diverses personnes pour des raisons politiques, fermé plusieurs quotidiens indépendants, entravé le fonctionnement de plusieurs autres et harcelé des ONG.

En Russie, les descentes de police dans les bureaux d'ONG, les difficultés d'inscription, l'intimidation de responsables et de membres du personnel d'ONG et les difficultés des travailleurs étrangers d'ONG à obtenir un visa ont eu un effet négatif, tout comme l'a eu l'adoption par le Parlement d'une nouvelle loi restrictive applicable aux ONG. Le Kremlin a aussi pris des mesures pour limiter les critiques des médias. Il a réduit la diversité de la presse parlée, en particulier de la télévision, qui est la principale source d'information pour la majorité des Russes. À la fin de 2005, toutes les stations indépendantes de télévision du pays ont été reprises soit par l'État soit par des organismes proches de l'État.

Cinquièmement, des élections démocratiques ne garantissent pas, à elles seules, que les droits de l'homme seront respectés, mais elles peuvent mettre un pays sur le chemin de la réforme et poser les fondations permettant d'institutionnaliser des protections en matière de respect des droits de l'homme.

Des élections démocratiques représentent néanmoins des jalons sur le long parcours conduisant à la démocratisation. Elles sont essentielles pour établir des gouvernements responsables et des institutions gouvernementales qui respectent la primauté du droit et qui répondent aux besoins de leur population.

En Irak, 2005 a été une année marquée par d'importants progrès pour la démocratie, les droits démocratiques et la liberté. Le nombre des ONG et des autres organisations de la société civile appuyant les droits de l'homme a augmenté régulièrement. Les élections parlementaires du 30 janvier ont constitué un formidable pas en avant en vue de consolider les institutions gouvernementales nécessaires à la protection des droits de l'homme et de la liberté dans un pays dont le passé a été maculé par des atteintes aux droits de l'homme qui figurent parmi les pires de l'histoire récente. Lors du référendum du 15 octobre et de l'élection du 15 décembre, les électeurs irakiens ont adopté une constitution permanente et ont élu les membres de la nouvelle législature du pays, le Conseil des représentants, consolidant ainsi les institutions démocratiques qui peuvent fournir le cadre d'un avenir démocratique. Si les élections historiques et les nouvelles institutions d'un gouvernement démocratique ont fourni une structure pour la réalisation de véritables avancées, une tension intense due à la violence généralisée, infligée surtout par des insurgés et des éléments terroristes, a caractérisé la vie civique et la trame sociale du pays. Par ailleurs, des éléments des milices sectaires et des forces de sécurité ont fréquemment agi indépendamment de l'autorité gouvernementale. Il n'en demeure pas moins que le gouvernement a fixé un processus juridique et électoral reposant sur le respect des règles politiques et y a adhéré.

Bien que privés de droits de l'homme fondamentaux pendant des années, les Afghans ont, en 2005, continué à montrer leur courage et leur attachement à un avenir fait de liberté et de respect des droits de l'homme. Le 18 septembre ont eu lieu les premières élections parlementaires en près de trois décennies. Les femmes ont voté en masse lors de ces élections auxquelles se présentaient notamment 582 candidates ; 68 femmes ont été élues à la Chambre basse à des sièges réservés aux femmes en vertu de la constitution de 2004. Dix-sept de ces femmes auraient été élues de plein droit même si des sièges ne leur avaient pas été réservés. À la Chambre haute, 17 des 34 sièges décidés par le président étaient réservés à des femmes ; les Conseils provinciaux ont élu 5 femmes de plus, portant le total à 22. Les élections parlementaires du 18 septembre ont eu lieu alors que le gouvernement s'efforçait d'élargir son autorité aux centres provinciaux, étant donné l'insécurité et la résistance violente qui s'y poursuivaient dans certains milieux.

En Ukraine, le dossier des droits de l'homme s'est nettement amélioré à la suite de la Révolution orange, qui a conduit à l'élection d'un nouveau gouvernement reflétant la volonté du peuple. En 2005, la responsabilisation des policiers s'est accrue et les médias ont eu davantage d'indépendance. Les entraves à la liberté de réunion ont en grande partie cessé, et la plupart des limites imposées à la liberté d'association ont été levées. En outre, divers groupes de défense des droits de l'homme, tant nationaux qu'internationaux, ont pu généralement travailler sans être harcelés par le gouvernement.

L'Indonésie, pays du monde ayant la plus forte population musulmane, a fait d'importants progrès en vue de renforcer l'architecture de son appareil démocratique. Par le truchement de plusieurs élections locales à caractère historique, les Indonésiens ont, pour la première fois, été en mesure d'élire directement leurs dirigeants aux niveaux local, régional et provincial. La situation au plan des droits de l'homme s'est améliorée, encore que d'importants problèmes demeurent et que de graves violations se poursuivent. Un événement crucial a été la signature, le 15 août, de l'accord de paix qui fait date avec le « Free Aceh Movement » mettant fin à des décennies de conflit armé. Le gouvernement a aussi inauguré l'Assemblée du peuple papou et a pris des mesures pour respecter les dispositions de la Loi spéciale de 2001 sur l'autonomie de la Papouasie.

Le Liban a fait d'importants progrès en mettant fin à l'occupation militaire par la Syrie qui durait depuis 29 ans et a retrouvé sa souveraineté avec un parlement élu démocratiquement. Cependant, l'influence continue de la Syrie est encore un problème.

Le Liberia a fait irruption sur la scène démocratique internationale après s'être écarté de son passé violent et fait un grand pas vers un avenir libre et démocratique. Le 23 novembre, Mme Ellen Johnson Sirleaf a remporté l'élection présidentielle multipartite, devenant ainsi la première femme à être élue présidente en Afrique, événement marquant dans la transition de ce pays qui est passé de la guerre civile à la démocratie. Le gouvernement temporaire a généralement respecté les droits de l'homme de ses concitoyens et a adopté des lois visant à renforcer les droits de l'homme. Cependant, les abus commis par la police, la corruption des fonctionnaires et d'autres problèmes ont persisté et ont été exacerbés par le legs de 14 années de guerre civile, notamment des infrastructures fortement endommagées, une pauvreté généralisée et le chômage.

Sixièmement, les progrès en matière de réforme démocratique et de droits de l'homme ne sont jamais linéaires ou garantis.

Dans certains pays, les institutions d'un gouvernement démocratique sont encore chancelantes et ont du mal à survivre. D'autres ne se sont pas encore pleinement engagés dans un processus démocratique. Les avancées peuvent être obscurcies par des irrégularités. Il peut y avoir de graves revers. Les gouvernements élus démocratiquement ne gouvernent pas toujours de façon démocratique une fois au pouvoir.

En 2005, de nombreux pays qui s'étaient engagés à instituer une réforme démocratique ont enregistré des progrès irréguliers, d'autres ont reculé.

Le dossier des droits de l'homme de la République du Kirghizistan s'est considérablement amélioré à la suite du changement de dirigeants entre mars et juillet, bien que des problèmes demeurent. Le président Akayev a fui le pays après que des manifestants de l'opposition se furent emparés du principal bâtiment gouvernemental, dans la capitale, pour protester contre les résultats des élections considérées comme défectueuses. L'élection présidentielle de juillet et les élections parlementaires de novembre ont constitué une amélioration dans certains domaines par rapport aux élections précédentes. Mais la réforme constitutionnelle est au point mort et la corruption reste encore un grave problème.

En Équateur, le parlement a évincé le président démocratiquement élu, M. Lucio Gutierrez, en avril, à la suite de manifestations sur une grande échelle et du retrait de l'appui du public aux chefs militaires et à la police nationale. Le vice-president Alfredo Palacio a remplacé M. Gutierrez et des élections ont été prévues pour 2006.

Le gouvernement transitoire de la République démocratique du Congo a repoussé les élections générales nationales à une date ultérieure mais le pays a tout de même organisé son premier scrutin démocratique à l'échelle nationale depuis 40 ans. Les électeurs ont approuvé en grand nombre une nouvelle Constitution lors d'un référendum national largement libre et équitable, malgré quelques irrégularités.

En juin, le parlement ougandais a approuvé un amendement controversé éliminant la limite des mandats présidentiels, permettant ainsi au président Museveni de briguer un troisième mandat. Cependant, lors d'un référendum national, les Ougandais ont voté en faveur de l'adoption d'un système de gouvernement multipartite et le parlement a amendé les lois électorales pour inclure la participation des partis d'opposition aux élections et au gouvernement.

Le gouvernement égyptien a amendé sa Constitution pour permettre la première élection présidentielle multipartite en septembre. Dix partis politiques ont présenté des candidats et la campagne électorale a été marquée par un vigoureux débat public ainsi que par une prise de conscience politique et un engagement renforcés. Mais le nombre des électeurs a été faible, et les rapports crédibles faisant état d'une fraude très répandue ont été nombreux durant l'élection. Accusé d'usage de faux, M. Ayman Nour, qui est arrivé en seconde place, a été condamné à cinq ans de prison après un procès ne répondant pas aux critères internationaux fondamentaux, qui a duré six mois, et il a été emprisonné en décembre ; son immunité parlementaire a été supprimée en janvier. D'importants gains ont été réalisés par les candidats affiliés aux « Frères musulmans », un parti proscrit, lors des élections parlementaires de novembre et de décembre. Ces élections ont été ternies par l'usage excessif de la force par les agents de sécurité, un faible nombre d'électeurs, et le truquage des votes. Les autorités ont a refusé la présence d'observateurs internationaux, que ce soit pour l'élection présidentielle ou les élections parlementaires. Le Conseil national des droits de l'homme, établi par le parlement égyptien, a publié son premier rapport annuel qui décrit franchement les abus commis par le gouvernement.

Durant les élections législatives éthiopiennes tenues en mai, les observateurs internationaux ont relevé de nombreuses irrégularités ainsi que des cas d'intimidation des électeurs. Des dizaines de manifestants qui protestaient contre les élections ont péri aux mains des forces de sécurité. Les autorités ont détenu, passé à tabac et tué des membres de l'opposition, des agents d'ONG, des membres de minorités ethniques et des représentants de la presse.

En Azerbaïdjan, les élections législatives de novembre se sont mieux déroulées à certains égards que par le passé mais ont néanmoins failli à certaines normes internationales. On a eu connaissance de rapports dignes de foi faisant état de l'immixtion d'autorités locales dans la campagne et de mésusage des ressources de l'Etat, de restrictions imposées à la liberté de rassemblement, du recours de la police à la force pour disperser des rassemblements ainsi que de sérieuses irrégularités, dont des cas de fraude, dans le dépouillement du scrutin. Les nouvelles mesures prises jusqu'à présent dans le cadre du processus postélectoral de règlement des plaintes n'ont pas entièrement corrigé les irrégularités du processus électoral.

On a noté au Kazakhstan des améliorations durant la période précédant l'élection présidentielle de décembre ; néanmoins, dans l'ensemble, cette élection n'a pas satisfait aux normes internationales relatives à un scrutin libre et honnête. Le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe a relevé de graves restrictions à la liberté d'expression politique visant certains types de critique à l'égard du président, un accès insuffisant des candidats indépendants et de l'opposition aux médias, et la perturbation violente de certains événements organisés par l'opposition pendant la campagne. Des lois adoptées en 2005, notamment la loi sur l'extrémisme et les amendements en matière de sécurité nationale et de droit électoral, ont érodé la protection juridique des droits de l'homme et augmenté le pouvoir de l'exécutif de réglementer et de contrôler la société civile et les médias. Toutefois, la Cour constitutionnelle a jugé inconstitutionnelle une loi restrictive à l'égard des ONG.

Déjà mauvais, le bilan des droits de l'homme en Ouzbékistan s'est encore nettement dégradé en 2005. En mai, une émeute dans la ville d'Andijon a provoqué une série de mesures répressives qui ont dominé le reste de l'année. Cette émeute avait commencé à la suite de manifestations pacifiques de soutien à des hommes d'affaires accusés d'extrémisme islamique et qui passaient en procès de février à mai. Durant la nuit du 12 au 13 mai, des inconnus ont saisi des armes dans une garnison de police, pris d'assaut la prison municipale où étaient détenus les accusés, tué plusieurs gardiens et libéré des centaines de prisonniers, dont les accusés. Le 13 mai, selon des témoins oculaires, les forces de l'ordre ont tiré au hasard sur une foule qui comprenait des civils non armés, faisant des centaines de morts. Par la suite, les autorités ont harcelé, battu et emprisonné des douzaines de militants des droits de l'homme, de journalistes et d'autres personnes qui avaient parlé de ces événements et ont condamné de nombreuses personnes à des peines de prison dans le cadre de procès qui ne semblaient pas satisfaire aux normes internationales. Elles ont également contraint beaucoup d'ONG locales et internationales à cesser leurs opérations et gravement limité le champ d'action de celles qui continuaient les leurs.

La Russie a vu la continuation des efforts entrepris en vue de concentrer le pouvoir au Kremlin et de diriger la démocratie à partir du sommet. A ces fins, le Kremlin a aboli l'élection directe des gouverneurs en faveur d'une simple nomination présidentielle avec l'aval du parlement. Dans le contexte actuel, où l'équilibre des pouvoirs est déjà bien fragile, ce dispositif limite la responsabilisation des élus devant le peuple tout en concentrant davantage le pouvoir dans l'exécutif. Les amendements apportés à la législation relative aux partis politiques, au lieu de renforcer à long terme les partis politiques nationaux comme ils sont censés le faire, risquent en fait de limiter leur aptitude à participer aux élections. Cette tendance, ainsi que les restrictions frappant toujours les médias, la complaisance du parlement, la corruption et la sélectivité dans l'application des lois, les pressions politiques pesant sur le judiciaire et le harcèlement de certaines ONG, se sont traduits par une érosion de la responsabilité des pouvoirs publics devant le peuple.

Le bilan des droits de l'homme au Pakistan reste insuffisant, en dépit de l'engagement déclaré du président Musharraf en faveur de la transition démocratique et de la politique de la « modération éclairée ». Des restrictions ont continué de peser sur la liberté de déplacement, d'expression, d'association et de religion. Les progrès de la démocratisation ont été limités. Lors des élections locales de 2005, les observateurs internationaux et nationaux ont décelé de graves défaillances, en particulier l'ingérence de partis politiques, qui ont affecté le résultat du scrutin dans certaines parties du pays. La police a détenu en avril une dizaine de milliers de militants du Parti populaire du Pakistan avant l'arrivée d'Asif Ali Zardari, l'époux de Benazir Bhuto, à un rassemblement électoral. Les forces de l'ordre ont commis des exécutions extrajudiciaires, des violations de procédure, des arrestations arbitraires et des tortures. La corruption était généralisée dans l'administration comme dans les forces policières, et les pouvoirs publics ont montré peu de zèle à combattre ce problème. Les responsables des forces de l'ordre qui commettaient des violations des droits de l'homme jouissaient généralement d'une sorte d'impunité légale de facto.

En dépit des dures réalités et de puissants obstacles, on note une montée mondiale des appels à la liberté individuelle et politique et à l'application des principes démocratiques. C'est ainsi que dans la région du Grand Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord (BMENA), on a vu apparaître ces dernières années des germes de pluralisme politique, des élections sans précédent, de nouvelles protections des femmes et des minorités et des aspirations autochtones à un changement démocratique pacifique.

Au Forum pour l'avenir tenu à Manama (Bahreïn) en novembre 2005, 40 représentants d'organisations de la société civile de 16 Etats du BMENA étaient présents aux côtés de leurs ministres des affaires étrangères. Ces représentants ont esquissé un cadre de priorités mettant l'accent sur l'Etat de droit, la transparence, les droits de l'homme et l'émancipation des femmes. Au sein de cette délégation de la société civile figuraient des représentants du Dialogue sur l'aide à la démocratie (DAD), qui ont présenté les résultats de discussions et de débats tenus au long de l'année entre les dirigeants de la société civile et leurs homologues de la fonction publique concernant des sujets essentiels tels que la réforme électorale et la création de partis politiques légitimes. Le réseau grandissant du DAD comprend des centaines de chefs de file de la société civile de la région du Grand Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord. Pour mieux appuyer les efforts de réforme dans cette région, une Fondation pour l'avenir destinée à apporter une aide directe à la société civile et un Fonds pour l'avenir visant à soutenir les investissements dans la région ont été créés lors du Forum. La participation de la société civile au Forum a atteint une dimension historique et positive, tant par son niveau que par le nombre de ses représentants, se soldant par un précédent important en faveur d'un dialogue et d'un partenariat authentiques entre la société civile et les pouvoirs publics sur les questions de réforme politique.

Le Forum pour l'avenir n'est que l'un de nombreux mécanismes au moyen desquels les Etats-Unis, d'autres pays du G8 et les Etats régionaux appuient les aspirations autochtones à la réforme dans le Grand Moyen-Orient et en Afrique du Nord.

Les appels grandissants aux droits de l'homme et à la démocratie dans le monde entier, illustrés dans le présent rapport, ne résultent pas de l'action impersonnelle d'une quelconque dialectique ou des orchestrations de puissances étrangères. Ils proviennent plutôt du puissant désir de l'homme de vivre dans la dignité et dans la liberté et du courage personnel et de la ténacité d'hommes et de femmes de toute époque et de toute société qui se vouent et se sacrifient à la cause de la liberté.

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