LA SALLE CHEZ LES ILLINOIS 33 leur mort, et escoutent facilement tout ce qu'on leur en veut dire, sans en croire pourtant rien, prenant mesme plaisir à en entendre parler, comme nous à lire des romans. Ils ne sçauroient s'imaginer que Dieu se fasche ou veuille punir les pécheurs. Ils sont fort adonnez au larcin, plus amateurs de leur liberté qu'aucune autre nation, ne respectant que fort peu les anciens, ce qui fait que la paix et la guerre sont de moindre durée parmy eux, ne dépendant que du caprice de la jeunesse. Ils sont environ deux mille combattants qui se font craindreà leurs voisins, qu'ils surpassent en vigueur et en l'usage des armes à feu. Il n'y en a point qui les égalent â la course, mais les Iroquois sont plus braves et tellement redoutez d'eux qu'ils leur ont desjà fait abandonner deux fois leur pays, quoique esloignez de quatre cents lieues, et ils les y auroient encore contraints cette année s'ils ne s'estoient rassurez par nostre voisinage. Le calumet termine d'ordinaire les guerres entre eux et leurs voisins : les plus foibles venant sous cette sauvegarde faire un présent aux vainqueurs, arrestent leurs haches qu'ils ne prennent d'ordinaire que pour venger la mort de quelque parent tué par surprise ou par trahison, et se satisfont aussy tost qu'ils ont eu leur revanche. Il n'en est pas de mesme de celle que les Iroquois leur ont déclarée. Ils ne l'entreprennent qu'à dessein de destruire la nation qu'ils ont attaquée et ne s'en désistent jamais qu'ils n'en soient venus à bout. Us l'ont entreprise contre les Islinois dans le temps où j'ay voulu y aller, et si je pouvois escrire toutes mes conjectures, j'aurois sujet de croire que c'a esté à la sollicitation de ceux qui s'en sont servis pour imprimer de la terreur à mes gens et m'embarrasser, faisant entendre aux Iroquois chez qui ils demeurent que mon entreprise n'a point d'autre but que de II 3