5^o Histoire Morale, Chap.24 mots ou ks pores font élargis ôc ouverts par la chaleur du Soleil. Mais Texpenence des Caraïbes, ôc de tant d'autres Peuples de la Zone torride qui vivent d'ordinaire un fi grand âge, pendant que nos Européens fontveus communément mourir jeunes, eft contraire à ce raifonnement naturel. Lors qu'il arrive, comme il ne fo peut autrement, que nos Caraïbes font attaquez de quelque mal, ils ont la connoiffan- ce de quantité d'herbes , de fruits, de racines , d'huyles & de gommes, par Tayde déquelles ils retournent bien-toft encon- valeteence, fi le mal n'eft pas incurable. Us ont encore un fecret affuré pourguenr la morfure des Couleuvres, pour- veu qu'elles n'ayent point percé la veine. Car alors il n'y a point de remède. C'eft le jus d'une herbe qu'ils appliquent fur la playe, ôc dans vint-quatre heutes ils font infaillible- ment guéris. Le mauvais aliment de Crabes Ôc d'autres Inteètes, dont ils fe nourriffent ordinairement, eft caufe qu'ils font prefque tous fujets à une fâcheufe maladie qu'ils nomment Pyans en leur langue, comme les François à la petite vérole. Quand ceus qui font entachez de cette fale maladie, mangent de la Tortue franche, ou du Lamantin , ou du Caret, qui eft une autre efpèce de Tortue, ils font incontinent après rous bou- tonnez , parce que ces viandes font fortir ce mal en dehors. Us ont auffi fouvent de groffes Apoftumes, des clous, Se des charbons en divers endroits du corps. Pour guérir ces maus quiproviennent la plupart de la mauvaite nourriture dont ils ufent; Us ont une écorce d'arbre appellee chipiou, amere comme fuye, laquelle ils font tremper dans de Teau, ôcayant râpé dans cette infufion le fonds d'un certain gros Coquilla- ge qu'on nomme Lambys, ils avalent cette Médecine.^ Us preffent auffi quelquefois , l'écorce fraîchement levée de quelques arbres de iMihy, ou d'autres Vimes qui rampent furlaterre, ou quis'acrochent aus arbres, ôc boivent le jus qu'ils en ont exprimé: mais ils ne fe fervent pas volontiers de ce remède, que quand tes arbres font en leur plus gran- de fève. Outre ces Médecines, avec léquelles ils purgent les mau- vaifes humeurs du dedans; ils appliquent encore au dehors , cer-