September 12, 2007

De nombreux conflits modernes sont des guerres alimentaires

Par David McKeeby Rédacteur de l'USINFO

Nous donnons ci-dessous le quatrième d'une série d'articles consacrés aux programmes d'aide alimentaire et agricole des États-Unis pour les populations vulnérables du monde.

Washington - Tout au long de l'histoire de l'humanité, la faim a été à la fois une cause et une conséquence de conflits. Pour cette raison, affirment l'anthropologue Ellen Messer et le spécialiste des sciences politiques Marc Cohen, la plupart des conflits modernes devraient être considérés comme des « guerres alimentaires », un concept qui implique des défis uniques pour les États-Unis qui sont le principal fournisseur d'aide alimentaire du monde.

« L'alimentation a un énorme poids moral dans notre société, et c'est bien ainsi », a déclaré Mme Messer lors d'un récent entretien accordé à l'USINFO. « Partager la nourriture fait partie de l'histoire de notre mode de vie. S'assurer que tout le monde a suffisamment à manger s'inscrit également dans toutes les traditions religieuses de l'Amérique. »

Au fil de leurs recherches sur le lien entre la faim et les conflits armés, Mme Messer, professeure à l'université Brandeis, et M. Cohen, chercheur à l'Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI), dont le siège est à Washington, ont publié une série d'articles sur la famine, la pauvreté et la distribution des ressources vivrières au sein des collectivités. Ils ont ainsi développé le concept de « guerre alimentaire », c'est-à-dire l'utilisation des réserves alimentaires par les parties au conflit pour récompenser leurs partisans et punir leurs ennemis.

Dans une étude réalisée en 2003, ils ont constaté que plus de 56 millions de personnes résidant dans 27 pays - soit 20 % de la population - subissaient une « insécurité alimentaire » sous forme de perturbation des chaînes d'approvisionnement, de pénuries et de malnutrition. Ils notaient en outre que l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture relevait des niveaux encore plus élevés dans certains pays, par exemple 25 % au Soudan, 43 % en Tanzanie et 49 % à Haïti. En Afghanistan, au Burundi, en République démocratique du Congo et en Somalie, ce taux dépassait les 70 %.

« Nous avons pris ces données comme point de départ pour étudier le concept de guerre alimentaire, où le conflit est l'une des principales causes de la faim. Nous avons étudié les nombreuses façons par lesquelles un conflit nuit à la sécurité alimentaire », a expliqué Mme Messer, notamment ses effets négatifs sur le revenu des foyers et la destruction des terres agricoles, des marchés, des écoles et des dispensaires. Les deux spécialistes ont également étudié le rôle de l'insécurité alimentaire dans le prolongement des conflits.

Aujourd'hui, a dit M. Cohen à l'USINFO, la plupart des guerres alimentaires se trouvent dans la région du Darfour au Soudan ; en Afrique orientale, notamment en Éthiopie, en Érythrée, en Somalie et en République démocratique du Congo ; enfin en Irak et en Afghanistan, où de nombreuses familles sont déplacées.

L'insécurité alimentaire reste un problème pour les familles chassées de leur foyer par les combats en Colombie, a-t-il ajouté, ainsi que pour les habitants de plusieurs pays récemment sortis d'un conflit, notamment la Serbie, la Bosnie-Herzégovine et le Tadjikistan, ce qui n'est pas sans conséquences graves pour leur avenir.

Briser le lien entre la faim et les conflits

Afin de briser le lien entre la faim et les conflits, a dit Mme Messer, les programmes d'aide doivent être mis en œuvre simultanément sur deux voies. Il faut réduire l'insécurité alimentaire en remédiant aux pénuries par une aide alimentaire d'urgence, tout en augmentant la sécurité alimentaire en aidant les résidents locaux à cultiver leurs propres semences et en renforçant l'économie régionale de façon à réduire la survenue d'autres conflits.

En garantissant une sécurité alimentaire élémentaire, l'aide alimentaire peut promouvoir la stabilité et aider les collectivités à résister aux appels à la violence ou au recrutement par des terroristes, qui exploitent souvent les griefs des populations pour justifier des attaques.

Ainsi, dans la foulée du tsunami qui a frappé l'Asie du Sud en 2004, a dit M. Cohen, les opérations de secours menées conjointement par l'armée nationale et des insurgés dans la région d'Aceh en Indonésie ont abouti à la signature d'un accord de paix en 2005, donnant un exemple de la façon dont l'aide alimentaire pouvait rapprocher des ennemis. Mais l'insécurité alimentaire n'est qu'une variable de l'équation, a-t-il admis, évoquant le Sri Lanka, où les hostilités ont repris après une brève interruption.

« Des mesures d'aide alimentaire sont importantes pour stimuler le processus de paix mais, à l'évidence, elles ne sont pas suffisantes pour produire ce résultat. » Pour établir la paix, il fait combiner toute une série de programmes d'aide.

Les vivres jouent un rôle particulièrement important dans les premiers mois qui suivent la fin d'un conflit, a-t-il ajouté, lorsque les familles déplacées et les anciens combattants rentrent chez eux et attendent les nouvelles récoltes.

« C'est à l'évidence une période durant laquelle l'aide alimentaire est une forme appropriée d'intervention. Mais il est important qu'elle soit liée au déminage, parfois à une réforme agraire, et à la reconstruction de l'infrastructure. »

En tant que principal donateur d'aide alimentaire au monde, les États-Unis ont un rôle important à jouer, mais ils doivent faire plus pour coopérer avec les Nations unies et les organisations caritatives non gouvernementales afin d'intégrer l'aide alimentaire d'urgence aux programmes de règlement des conflits.

« Si l'on veut rétablir la sécurité alimentaire dans les anciennes zones de conflit, il faut instaurer la sécurité. C'est le dilemme auquel se heurtent nombre des projets de reconstruction et de réconciliation », a affirmé Mme Messer.

Washington - Tout au long de l'histoire de l'humanité, la faim a été à la fois une cause et une conséquence de conflits. Pour cette raison, affirment l'anthropologue Ellen Messer et le spécialiste des sciences politiques Marc Cohen, la plupart des conflits modernes devraient être considérés comme des « guerres alimentaires », un concept qui implique des défis uniques pour les États-Unis qui sont le principal fournisseur d'aide alimentaire du monde.

« L'alimentation a un énorme poids moral dans notre société, et c'est bien ainsi », a déclaré Mme Messer lors d'un récent entretien accordé à l'USINFO. « Partager la nourriture fait partie de l'histoire de notre mode de vie. S'assurer que tout le monde a suffisamment à manger s'inscrit également dans toutes les traditions religieuses de l'Amérique. »

Au fil de leurs recherches sur le lien entre la faim et les conflits armés, Mme Messer, professeure à l'université Brandeis, et M. Cohen, chercheur à l'Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI), dont le siège est à Washington, ont publié une série d'articles sur la famine, la pauvreté et la distribution des ressources vivrières au sein des collectivités. Ils ont ainsi développé le concept de « guerre alimentaire », c'est-à-dire l'utilisation des réserves alimentaires par les parties au conflit pour récompenser leurs partisans et punir leurs ennemis.

Dans une étude réalisée en 2003, ils ont constaté que plus de 56 millions de personnes résidant dans 27 pays - soit 20 % de la population - subissaient une « insécurité alimentaire » sous forme de perturbation des chaînes d'approvisionnement, de pénuries et de malnutrition. Ils notaient en outre que l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture relevait des niveaux encore plus élevés dans certains pays, par exemple 25 % au Soudan, 43 % en Tanzanie et 49 % à Haïti. En Afghanistan, au Burundi, en République démocratique du Congo et en Somalie, ce taux dépassait les 70 %.

« Nous avons pris ces données comme point de départ pour étudier le concept de guerre alimentaire, où le conflit est l'une des principales causes de la faim. Nous avons étudié les nombreuses façons par lesquelles un conflit nuit à la sécurité alimentaire », a expliqué Mme Messer, notamment ses effets négatifs sur le revenu des foyers et la destruction des terres agricoles, des marchés, des écoles et des dispensaires. Les deux spécialistes ont également étudié le rôle de l'insécurité alimentaire dans le prolongement des conflits.

Aujourd'hui, a dit M. Cohen à l'USINFO, la plupart des guerres alimentaires se trouvent dans la région du Darfour au Soudan ; en Afrique orientale, notamment en Éthiopie, en Érythrée, en Somalie et en République démocratique du Congo ; enfin en Irak et en Afghanistan, où de nombreuses familles sont déplacées.

L'insécurité alimentaire reste un problème pour les familles chassées de leur foyer par les combats en Colombie, a-t-il ajouté, ainsi que pour les habitants de plusieurs pays récemment sortis d'un conflit, notamment la Serbie, la Bosnie-Herzégovine et le Tadjikistan, ce qui n'est pas sans conséquences graves pour leur avenir.

Briser le lien entre la faim et les conflits

Afin de briser le lien entre la faim et les conflits, a dit Mme Messer, les programmes d'aide doivent être mis en œuvre simultanément sur deux voies. Il faut réduire l'insécurité alimentaire en remédiant aux pénuries par une aide alimentaire d'urgence, tout en augmentant la sécurité alimentaire en aidant les résidents locaux à cultiver leurs propres semences et en renforçant l'économie régionale de façon à réduire la survenue d'autres conflits.

En garantissant une sécurité alimentaire élémentaire, l'aide alimentaire peut promouvoir la stabilité et aider les collectivités à résister aux appels à la violence ou au recrutement par des terroristes, qui exploitent souvent les griefs des populations pour justifier des attaques.

Ainsi, dans la foulée du tsunami qui a frappé l'Asie du Sud en 2004, a dit M. Cohen, les opérations de secours menées conjointement par l'armée nationale et des insurgés dans la région d'Aceh en Indonésie ont abouti à la signature d'un accord de paix en 2005, donnant un exemple de la façon dont l'aide alimentaire pouvait rapprocher des ennemis. Mais l'insécurité alimentaire n'est qu'une variable de l'équation, a-t-il admis, évoquant le Sri Lanka, où les hostilités ont repris après une brève interruption.

« Des mesures d'aide alimentaire sont importantes pour stimuler le processus de paix mais, à l'évidence, elles ne sont pas suffisantes pour produire ce résultat. » Pour établir la paix, il fait combiner toute une série de programmes d'aide.

Les vivres jouent un rôle particulièrement important dans les premiers mois qui suivent la fin d'un conflit, a-t-il ajouté, lorsque les familles déplacées et les anciens combattants rentrent chez eux et attendent les nouvelles récoltes.

« C'est à l'évidence une période durant laquelle l'aide alimentaire est une forme appropriée d'intervention. Mais il est important qu'elle soit liée au déminage, parfois à une réforme agraire, et à la reconstruction de l'infrastructure. »

En tant que principal donateur d'aide alimentaire au monde, les États-Unis ont un rôle important à jouer, mais ils doivent faire plus pour coopérer avec les Nations unies et les organisations caritatives non gouvernementales afin d'intégrer l'aide alimentaire d'urgence aux programmes de règlement des conflits.

« Si l'on veut rétablir la sécurité alimentaire dans les anciennes zones de conflit, il faut instaurer la sécurité. C'est le dilemme auquel se heurtent nombre des projets de reconstruction et de réconciliation », a affirmé Mme Messer.

(Distributed by the Bureau of International Information Programs, U.S. Department of State.)